Dimanche 17 octobre 2010 à 17:04

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Avant de commencer ce compte-rendu de lecture, je vous confesse qu'il s'agit de ma première note sur un recueil poétique. Je suis donc novice, pourtant je pense avoir compris, et surtout ressenti, beaucoup de thématiques abordées par l'auteur.  



La première chose qui m'a interpellée en ouvrant Les oies ne peuvent pas nous dire, c'est la mise en page : le texte occupe à peine quelques lignes, le vide prend le dessus. Les mots, les lettres même sont espacés. On devine au premier regard que la poésie de Mireille Gagné ne se perdra pas en fioritures superflues, que chaque mot aura un sens, une résonnance particulière. 


J'ai également apprécié la construction du livre, qui se dévoile en quatre parties évoquant chaque saison du calendrier. Ce choix n'a rien d'anodin, puisqu'il évoque l'idée de la vie comme un cycle, sujet central de ce recueil. En effet, l'auteur croit que l'être humain, à l'image des oies du titre, observe une migration perpétuelle qui le ramène toujours à ses origines. 
 

Dès lors, l'enfance de Mireille Gagné occupe une place de choix. Le recueil s'ouvre d'ailleurs sur la naissance de cette dernière, venue au monde brutale, qui annonce la complexité de la relation mère-fille. 


" Je n'arrive pas doucement 
cramponnée à l'hiver
ronge ma mère
ses battures
grimpée dans ses champs
je la sens qui se contracte
sous le contact des doigts "
 
 
La mère est associée à l'image de la mer, du fleuve, source de vie mais qui peut également se glacer. Le père est quant à lui rapproché de l'île, du repère au milieu de l'océan (re-père), mais également d'une figure de chasseur, protecteur et nourricier. 


Ce rattachement à l'enfance doit pourtant être dépassé, et c'est ainsi que l'été apporte une rupture nécessaire. L'automne se révèle plus mélancolique encore, saison de la chute des feuilles, du dénudement, de la perte. 


" Les pantalons trop lourds pour mon âme
je m'écrase sur le sol
la terre tremble
des débris d'enfance sous les ongles
en vain
je cherche par quel bout me prendre par la main"


L'hiver clot le livre. Pourtant, ce dernier révèle un ultime chapitre, celui de l'éternité. Je le vois comme l'au-delà, ou le cycle du souvenir.


" Je coupe les fils qui retiennent l'aube
plonge dans l'eau
de glace et de phares
rejoins l'île
mon père
ma mère
cette terre qui m'a conçue
avec un coeur d'or et de jonc"



En abordant sa vie, par des mots simples mais choisis, Mireille Gagné soulève des questions existentielles et touche au domaine de l'universel. Les oies ne peuvent pas nous dire est donc un recueil contemporain, sobre et beau, dont le langage sans détour m'a touchée. 
 


Dimanche 3 octobre 2010 à 15:27

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Un enfant de l'amour est l'incarnation du roman qui génère en moi des attentes considérables. Ce sentiment est lié à plusieurs facteurs : le premier est qu'il s'agit d'une recommandation de ma maman, et (vous le savez désormais) elle ne se trompe jamais. De plus, la couverture annonce fièrement que l'auteur a remporté le Prix Nobel de littérature en 2007, gage de qualité presque aussi fiable que le premier. 


Le bouquin compte moins de 200 pages, je l'imagine donc allant à l'essentiel, sans lourdeurs, ni fioritures inutiles.  Voyons si mes espoirs ont été déçus ou non !



Durant l'été 1939, le jeune James Reid, passionné de poésie, est appelé au combat. Lors d'une escale au Cap, il rencontre Daphné, une épouse de militaire, dont il tombe follement amoureux. Quelques mois plus tard, il apprend que de cette union est né un enfant. Dès lors, James fera tout ce qui est en son pouvoir pour rencontrer son fils.



Vous l'aurez compris, voici donc un nouveau roman de guerre à ajouter à ma collection... Mais celui-ci occupe indéniablement une place à part. Un enfant de l'amour m'a littéralement transportée. Si la première partie, qui se déroule avant l'escale africaine, m'a d'abord paru un peu longue (vite, vite l'histoire d'amour!), elle permet en réalité de faire réellement connaissance avec James, de découvrir ses racines, ses rencontres, ce qui l'amène à devenir cet adulte intelligent, fort et rêveur. Les pages consacrées à la traversée en bateau sont extrêmement vivantes et m'ont marquée au point que j'avais l'impression d'être moi aussi montée à bord. 

 


La rencontre de James et Daphne se produit lors d'un arrêt bienvenu au Cap. Menant tous deux une existence qu'ils n'ont pas véritablement choisie, ils voient en l'autre le symbole du changement de vie qu'ils attendaient depuis longtemps. Leur rapprochement s'opère dès lors naturellement, sans grande déclaration ni preuve d'amour sensationnelle. Leur histoire naît comme une évidence.


Cette parenthèse africaine doit pourtant prendre fin et James reprend la mer vers à destination de l'Inde. La suite du roman nous dévoile la guerre sous un jour original, celui de l'ennui. Les soldats condamnés à l'inactivité la plus totale prennent leur mal en patience, et quand la nostalgie l'emporte, le désespoir et la folie ne sont jamais loin.  


 
En conclusion, je vais désormais remplir ma bibliothèque d'ouvrages de Doris Lessing, dont l'écriture et les personnages m'ont enchantée. Je vous recommande chaudement Un enfant de l'amour, à lire d'une traite, en écoutant un album des Andrews Sisters !


 



 

Lundi 6 septembre 2010 à 8:08

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Daisy, jeune new-yorkaise de quinze ans, débarque au printemps chez des cousins qu'elle n'a jamais rencontrés et qui vivent dans la campagne anglaise. Elle y découvre un univers bien différent de Big Apple, rythmé par les travaux de la ferme, les escapades à la rivière et marqué par des liens fraternels qu'elle ignorait jusqu'alors.

Mais ce monde idyllique est bouleversé lorsqu'un attentat de grande ampleur sème la panique à Londres. La tante de Daisy, immobilisée à l'autre bout du continent, ne peut pas rentrer à la maison et les cousins vont devoir s'organiser dans un climat de guerre incertain et inquiétant.




Au moment où je vous écris, cela fait une nuit que j'ai terminé ce roman et j'en ai déjà ouvert un autre, pourtant, j'ai toujours l'impression d'appartenir à l'univers dépeint par l'auteur. Je ne sais pas ce que cela signifie pour vous, mais à mes yeux, c'est la preuve imparable d'un livre sacrément réussi !



Ce qui participe à cette dimension immersive est sans conteste le décor planté par Meg Rosoff. C'est un élément dont je parle somme toute assez peu dans mes notes de lecture, mais dans ce cas précis, il s'impose de lui-même. D'une part, la description de la campagne anglaise, de ses fleurs, ses arbres, ses parfums, ses couleurs, m'a envoûtée. Sans lourdeur, l'auteur nous offre une réelle évasion au coeur d'une nature foisonnante et féerique. 


Dans un second temps, c'est l'atmosphère générale qui m'a interpellée, puisque l'histoire est contemporaine (l'héroïne a un téléphone portable, elle envoie des e-mails...) mais se déroule en temps de guerre. Cette situation politique atteint d'autant plus le lecteur qu'elle est vue à travers les yeux d'une adolescente venue d'un autre pays et qui ne comprend pas les tenants et les aboutissants du conflit. Comme Daisy, on se sent dès lors pris au piège et on se méfie de tout et de tous.



J'ai beaucoup apprécié le style de l'auteur, la façon dont s'exprime la narratrice : avec son langage imagé, ses jeux sur les mots et autres appartés, elle apporte une certaine légèreté au récit. Nous lisons ses moindres pensées, ce qui la rend proche et attachante. Hormis Daisy, je suis également tombée amoureuse de chacun de ses cousins : Ogbert, l'aîné et le plus discret, mais aussi et surtout l'énigmatique Edmond, le sensible Isaac et l'adorable Piper.



L'histoire n'est pas bien longue, à peine plus de 200 pages, mais j'y ai trouvé une densité narrative et émotionnelle rare. Je ne peux dès lors que conseiller How I live now (Maintenant c'est ma vie, en français), un roman qui ne laissera ni les lecteurs adolescents, ni les lecteurs adultes indifférents. 

 

 





 

Mardi 31 août 2010 à 18:04

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Roses à crédit est un roman que j'ai découvert suite à la recommandation plus qu'enthousiaste de ma maman. Ses conseils littéraires valant leur pesant d'or, je n'ai pas hésité à me plonger sans plus attendre dans la prose de Madame Louis Aragon... 



La nature a beaucoup donné à Martine, les hommes peu. Elle est belle, elle a le rare don d'aimer. Mais à notre âge de nylon, elle est venue au monde dans des conditions de l'âge de pierre. Aussi le confort moderne, le cosy-corner, seront-ils son premier idéal, et le métier de manucure parmi les miroirs et les parfums d'un salon de coiffure suffit à ses rêves de beauté. Elle est en cela semblable à des millions d'êtres.

Daniel Donelle, l'amour de Martine, est déjà au-delà de cet idéal électroménager. Rosiériste ; touché par l'aile de la science, il rêve à un rose nouvelle qui aurait la forme de la rose moderne, et le parfum inégalable de la rose ancienne.

Un jour, Daniel créera la rose parfumée Martine Donelle, mais elle ne sera plus un hommage qu'à la souffrance. 




Ma première remarque suite à cette lecture concerne la thématique centrale du roman : la société moderne. Martine est avide de jolis objets et profite jusqu'à l'abus des opportunités de son temps et des tristement célèbres "facilités de paiement", tandis que Daniel occupe une position plus intermédiaire, avant-gardiste au sein de sa science, conservateur dans le domaine des goûts.  

L'auteur traite de la question du progrès et de la façon dont on peut s'en emparer, pour le meilleur comme pour le pire. Ce propos, d'une actualité saisissante, nous ferait presque oublier que Roses à crédit a été publié en 1959 !


J'ai particulièrement apprécié la façon dont Elsa Triolet conçoit le personnage de Martine. Si son univers se limite aux produits de beauté et aux meubles en kit et que ses sujets de conversation demeurent irrévocablement superficiels, Martine est cependant loin d'être écervelée. Elle possède au contraire une intelligence certaine qui lui permet de tout mettre en oeuvre pour parvenir à ses fins.


Par ailleurs, sa soif de beauté et de propreté n'est pas qu'une lubie, elle trouve son origine dans les conditions de vie déplorables qui étaient les siennes jusqu'à l'adolescence. En plus d'être un personnage nuancé, Martine est donc une héroïne touchante... bien que souvent exaspérante !


L'issue de cette histoire est à la hauteur de la vie de Martine : théâtrale, dramatique, inéluctable. Une leçon doit être tirée, et l'on ressent alors réellement la dimension critique de l'ouvrage, qui selon moi s'attaque cependant davantage à la société de consommation qu'aux consommateurs eux-mêmes. 

 


Pour toutes ces raisons, je recommande mille fois Roses à crédit qui développe avec beaucoup de subtilité un personnage d'irrésistible acheteuse compulsive... près de cinquante ans avant Sophie Kinsella et son accro du shopping !

 

 

Vendredi 20 août 2010 à 9:32

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C'est avec un peu de tristesse que je poste cette note : en effet, je viens de terminer la lecture du tome III de Lili Klondike.. Et je sais qu'il n'y aura pas de quatrième volume à ces aventures qui m'ont enchantée. Il semble bien que je sois en train de devenir une vraie lectrice sentimentale, même si je suis persuadée de ne pas être la seule à avoir éprouvé quelques difficultés à abandonner le Yukon et ses héroïnes uniques en leur genre !  

 

Juin 1898. La ruée vers l'or dure depuis un an et ce sont plus de quarante mille personnes qui peuplent désormais le nouveau territoire du Yukon. Après une série d'aventures, Rosalie et Liliane ont atteint le Klondike le coeur rempli d'espoir. Loin d'être pavées d'or, cependant, les rues de Dawson sont semées d'embûches.



En me plongeant dans ces pages, j'ai eu le bonheur de retrouver tous les éléments qui me plaisent tant dans cette saga : péripéties, dangers, rebondissements en séries ... Cependant, ce tome conclusif est sans conteste le plus sombre de la série. 

Ce qui nous semblait assuré dans le volume précédent se voit remis en question voire balayé d'un revers de main, et l'on s'aperçoit plus que jamais que l'univers du Klondike se caractérise avant toute chose par son extrême instabilité. 

Par ailleurs, c'est le côté obscur de chaque personnage qui nous est cette fois dévoilé. Même les deux Lili se révèlent de moins en moins irréprochables, leur soif de fortune les rendant prêtes à tout... ou presque !  Alors que Rosalie se retrouve actrice, Liliane s'avère une femme d'affaires redoutable, et lorsque que l'or s'ammoncelle, les réputations sont de plus en plus difficiles à préserver. Loin de me décevoir, ce développement de l'histoire m'a paru interpellant et réaliste. 

Sans trop en dire, je préciserai simplement que la fin de la série se situe dans cette lignée. Comme je vous le disais, je dois être devenue gravement fleur bleue car j'espérais un vrai happy end. Mais j'ai eu tort de souhaiter une issue hollywoodienne car, dans le Yukon, toutes les histoires ne finissent pas bien et la ruée vers l'or n'a d'idylliques que les espoirs que l'on place en elle.  


En conclusion, je ne peux que vous recommander cette superbe trilogie, bien écrite, richement documentée, et incroyablement addictive ! 

 

Merci à Sophie Méley-Daoust et Julie Turcot
(VLB éditeur w l’Hexagone wTypo) 
de m'avoir si gentiment offert ce troisième tome !




 

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